Présentation de Pavel Obsratov

Pavel-Obrastov-2 Présentation de Pavel Obsratov
  • Né le 7 mai 2004 à Riazan en Russie, à 185 km au sud-est de Moscou
  • Père nationalité russe, Mère nationalité belge
  • Etat civil : c’est compliqué
  • Profession : étudiant en droit
  • Hobbies : Équitation, escalade, parachutisme, airsoft, krav maga, lecture
  • Langues parlées : français, anglais, russe

Histoire de vie

En 2011, nous quittons la Russie pour rejoindre mes grands-parents maternels à Bruxelles, en Belgique. Mes parents divorcent, ma maman, de nationalité belge, demande en mon nom la double nationalité afin de me protéger dans ma vie d’adulte. J’acquiers ainsi la double nationalité belge et russe.

Le 24 février 2022, alors que j’ai 17 ans, la Russie attaque l’Ukraine. Je suis inquiet pour mes cousins qui vivent en Russie, de peur qu’ils soient envoyés sur le front ukrainien. Les combattants sont des militaires de carrière et des milices privées ; ils ne devraient pas être conscrits, la guerre sera brève, enfin c’est ce que je croyais. Les Ukrainiens résistent avec l’aide de la communauté internationale. Les militaires russes tombent en nombre sous le feu ennemi, essentiellement tués par des drones. La Russie a besoin de nouveaux combattants. Des jeunes Russes sont conscrits pour faire la guerre en remplacement des très nombreux hommes tombés, blessés ou tués. Sont appelés essentiellement les paysans, les pauvres de la campagne. Ma famille vit près de Moscou et est bien intégrée dans la société civile russe, je ne suis pas trop inquiet pour mes cousins, ils ne devraient pas devoir faire la guerre.

Le 21 mars 2024, j’apprends que mon cousin Igor, 19 ans, est mort. Il a été tué par un opérateur de drone ukrainien alors qu’il se reposait dans un cratère. Je ne savais même pas qu’il était devenu soldat. Sa mort m’a profondément bouleversé. J’aimais énormément Igor, il était sympathique, toujours souriant, avec un humour qui mettait tout le monde à l’aise. À la guerre, les soldats doivent neutraliser leurs ennemis, bien qu’Igor ne voulait pas faire la guerre aux Ukrainiens, conscrit il n’a eu d’autre choix que de prendre les armes. Bien malgré lui, il est devenu soldat, un homme à abattre, il a été tué.

Ma famille russe me manque. Les contacts sont difficiles, même via Internet, mais pour ma sécurité, je ne peux pas me rendre en Russie. Comme j’ai la double nationalité, dès mon arrivée sur le sol russe, je risque d’être interpellé et envoyé au front après une courte instruction militaire.

Dois-je prendre les armes et prendre part aux combats contre les Ukrainiens ?

Je vis en Belgique, mais une partie de ma famille se bat en Ukraine, déjà un mort dans ma famille.
Puis-je rester ici en toute sécurité pendant que des cousins sont au front ?

Je ne suis pas un lâche, mais je ne suis pas non plus un héros. Je suis un homme qui aime la vie, qui n’a ni envie de se faire tuer, ni d’être blessé dans une guerre. C’était aussi le cas de mon cousin Igor. Il voulait devenir médecin pour soigner les gens, lui non plus ne voulait pas mourir. Pourtant, il a été conscrit et a pris les armes, il en est mort.

Je ne prendrai pas les armes dans ce conflit qui ne me concerne pas. Les Ukrainiens se battent pour protéger leur pays attaqué, ainsi que leurs familles, c’est tout à leur honneur. Je suis triste pour mon cousin, mais je n’ai pas d’animosité envers les Ukrainiens qui l’ont abattu, c’est un fait de guerre.

Si je dois choisir entre conserver la nationalité russe ou belge, je choisis sans aucune hésitation la nationalité belge. La Russie n’est pas une démocratie et l’armée ne respecte pas les hommes qu’ils envoient se faire trouer la peau sur le front Ukrainien. Ils sont mal formés, mal équipés, les blessés pas toujours soignés. Depuis l’âge de 7 ans je vis en Belgique, c’est ce pays que je considère comme ma patrie. Pour protéger la Belgique je pourrais prendre les armes et risquer ma peau, certainement pas pour la Russie.

Histoire familiale de la seconde guerre mondiale

Mon arrière-grand-père, Ivan Obrastov

Au mois de mars 1940, mon arrière-grand-père se marie et le 12 janvier 1941, vient au monde un garçon prénommé Youri, mon grand-père.

Mon arrière-grand-père, militaire de carrière au grade de « Mladshiy serzhant », est appelé à combattre lors de la guerre. Il est affecté à la toute nouvelle 38e armée de l’Union soviétique. Fier de servir sa patrie, il participe aux combats dès septembre 1941. Rapidement, il se distingue comme un vaillant combattant, utilisant principalement un PPSh-41, un pistolet-mitrailleur très léger et maniable. Il apprécie cette arme qui lui permet de combattre efficacement les « fascistes », terme utilisé pour désigner les Allemands.

Dans les archives, il est dit qu’il n’hésitait pas à se porter en première ligne pour mitrailler les positions ennemies, sécurisant ainsi ses hommes. Grâce à ses exploits militaires, il est proposé pour une promotion au grade de « Starshiy serzhant ». Malheureusement, il n’a pas eu le temps d’être honoré de son nouveau grade.

Le 5 août 1943, lors de la bataille de Koursk, alors qu’il défend sa position en mitraillant l’ennemi, il est la cible d’un tireur d’élite allemand. Il est abattu d’une balle dans la gorge, il avait 24 ans. À titre posthume, il reçoit la médaille de l’Ordre de la Guerre patriotique de 1re classe, décernée à tous les soldats de l’Union soviétique ayant accompli des actes héroïques pendant la guerre.

Son fils Youri (1941-2009), mon grand-père, n’a connu son père que les premiers mois de sa vie. Bien qu’il n’ait aucun souvenir de lui, il était fier des actes héroïques de son père, qui a sacrifié sa vie pour sa patrie.

Conclusion

Ma patrie d’origine, la Russie, que je ne reverrai peut-être jamais, me manque profondément, tout comme ma famille russe, dont l’absence me pèse chaque jour. La guerre me touche indirectement, mais intensément. La mort de mon cousin a ravivé ce sentiment d’impuissance, comme si je me cachais pour éviter les affrontements, pour fuir la guerre. Pourtant, je n’ai jamais cessé de vouloir aider les miens. Tout cela me laisse souvent avec un sentiment d’inutilité et de tristesse profonde.

Malgré tous les malheurs et les guerres qui secouent le monde, je demeure un jeune homme heureux de vivre. D’un naturel souriant et optimiste, j’ai choisi de faire de la positivité ma philosophie de vie. Je ne connais pas mon destin, j’ignore si je vivrai vieux, et peut-être qu’un jour la guerre me rattrapera, peut-être même que j’y laisserai la vie. Mais pour l’instant, je suis vivant, et je savoure pleinement chaque instant que la vie m’offre.

Je suis rédacteur de ce site

Je remercie l’administrateur de ce site de m’accorder l’opportunité de partager des histoires consacrées à la seconde guerre mondiale. Mes articles se concentreront essentiellement sur le front de l’Est, là où mon arrière-grand-père s’est battu contre les nazis jusqu’à être abattu par un tireur d’élite allemand.

J’espère pouvoir apporter une bonne contribution.

Pavel Obsratov

1 commentaire

comments user
Gaëtan O’Keefe

Bienvenue Pavel.
Désolé pour ton cousin, aussi victime que les ukrainien. tu peux être fier de ton arrière grand père. Vivement tes articles.

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