Le dernier soldat belge tué le 1 novembre 1918, le tragique destin du caporal Marcel TERFVE

TERFVE Marcel Toussaint Louis Joseph
- Né le le 2 décembre 1893 (lundi) – Liège, 4000, Liège, Wallonie, BELGIQUE
- Tué le 1 novembre 1918 (lundi) – Canal de Gand -Terneuzen (devant les voûtes), à l’âge de 24 ans
- Caporal VG 1914, 3e compagnie, 1er régiment de Ligne, matricule 101/63740
- Profession (civil) : Inspecteur d’assurances
Informations
Né à Liège, le caporal Marcel TERFVE est tué d’une balle dans le poumon gauche le long du canal Gand-Terneuse le 11 novembre 1918 à 10h45.
Inspecteur d’assurance dans le civil, fils de notaire, dès l’invasion Allemande Marcel se porte volontaire en 1914 pour se battre et défendre sa patrie. Il est enrôlé dans la 3e compagnie, 1er régiment de Ligne. Il connaîtra la défense de la ligne de la Gette, la bataille de l’Yser en octobre 1914, la chute de Dixmude et passera les 4 années de guerre dans les tranchées.
Le 11 novembre 1918, le premier régiment a rejoint la rive gauche du canal Gand-Terneuse devant le village de Kluizen. À 06H40, le premier régiment reçoit un message du haut-commandement informant qu’un cessez-le-feu interviendrait à 11H00. Ce message est confirmé à 09H08. Un officier note cependant qu’il existe encore un nid de mitrailleuses sur la rive droite du canal.
D’un côté un groupe de soldats Belges imprudents pensant déjà que la guerre est sur le point de se terminer et de l’autre côté, des soldats Allemands amers de leur défaite, le drame devait se produire.
Il est 10H42 lorsque les mitrailleurs Allemands ouvrent le feu sur le groupe, fauchant trois soldats en bord du canal. Deux soldats sont grièvement blessés, mais le troisième, notre caporal Marcel TERFVE, a quant à lui reçu plusieurs balles, dont une qui lui a perforé le poumon gauche. Il est 10H45, Marcel est tué, le der des ders, un quart d’heure avant le traité de paix.
C’est un acte de guerre, mais était-il légitime d’encore se battre et de tuer à un quart-d’heure du cessez-le-feu ?
D’un point de vue juridique, les Allemands pouvaient justifier leur action : le cessez-le-feu n’était pas encore effectif, les lois de la guerre autorisent d’attaquer l’ennemi s’il est armé même s’il ne représente pas une menace directe, nous ne pouvons dès lors en aucun cas parler de crime de guerre.
D’un point de vue militaire, la mise à mort de l’ennemi est une nécessité dans le feu de l’action, afin d’assurer sa propre survie ou de remporter une bataille. Lorsque le soldat aperçoit un ennemi, il a pour mission de neutraliser l’adversaire, soit en le capturant, soit en l’éliminant. Cette logique militaire repose sur le principe que réduire le nombre de combattants ennemis affaiblit les forces adverses. Une armée peut posséder un stock incroyable d’armes et munitions mais si elle est à cours de combattants, elle ne peut vaincre son adversaire. Dans le cas qui nous occupe, cette justification ne tient plus. À quelques minutes de l’armistice, la défaite était scellée.
D’un point de vue moral, cet acte est évidemment condamnable. Tuer l’ennemi à quelques minutes de la paix sans nécessité militaire et sans être menacé apparaît davantage comme un geste de désespoir ou de vengeance qu’une nécessité. Le caractère gratuit de cet acte de violence extrême avec pour conséquence deux soldats blessés et un soldat tué est une ignominie, mais l’histoire démontre que la guerre transforme les hommes qui la font, peut-être davantage dans la défaite ce qui a parfois pour conséquence une prise de décision irrationnelle qui peut amener à ce genre de drame.
Des psychiatres ont démontré que tout homme est capable de tuer un autre individu dans un contexte extrême qui dépasse sa capacité à raisonner. La littérature sur des situations similaires en tant de guerre démontre qu’il n’est pas rare qu’un soldat dès plus respectable puisse en cas de situation extrême avoir des pulsions criminelles et irrésistibles, alors que la situation permet d’éviter l’utilisation de la violence envers l’ennemi.
Nous est-il possible d’imaginer le désespoir qu’ont du ressentir ces Allemands à quelques minutes de la capitulation après s’être battus durant des années dans une effroyable guerre pour in fine la perdre ? L’objectif n’est certainement pas de trouver des excuses à ces soldats Allemands, mais de tenter comprendre pourquoi le caporal Marcel TERFVE a été inutilement tué. Quelque soit la raison ou les réelles motivations de cette attaque, Marcel TERFVE en a fait les frais et il en est mort, c’est ainsi que s’achève son histoire de vie … et un quart-d’heure plus tard la première guerre mondiale.
Par Alain Schenkels

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